« Lettre ouverte aux Députés de l’Assemblée nationale et au Gouvernement ».
Saint Maclou La Brière, le 22 septembre 2023,
Mesdames, Messieurs les Députés,
Je me permets de vous écrire à propos de ma situation au sein d’EDF et dans l’urgence d’un conseil de discipline prévu le 10 octobre 2023 au siège de la Division Production Nucléaire à Paris.
Je m’appelle BEGIN Arnaud, j’ai 52 ans et je suis père d’une fille de 8 ans et d’un fils de 23 ans. Avec mon épouse, elle aussi salariée chez EDF, nous menions une existence heureuse jusqu’en septembre 2018, date à laquelle ma vie va basculer. À partir de septembre 2018, je vais en effet soudainement être victime, sur le site nucléaire de Chooz (08) où je travaille, d’actes de harcèlement moral que je ne comprends pas… et ce, après 25 années passées au sein de la société EDF sur des emplois en lien avec la sûreté nucléaire. Ces actes de harcèlement moral, de discrimination et d’intimidation ne se contenteront pas de porter atteinte à ma dignité, d’altérer ma santé physique et mentale. Désormais, cet acharnement compromet également mon avenir professionnel, puisqu’après cinq ans de harcèlement incessant, la nouvelle direction d’EDF a décidé de « frapper » un grand coup et de faire rentrer les autres salariés dans le rang en décrétant, sans motif objectif, mon passage en conseil de discipline et donc mon licenciement.
Je n’ai eu de cesse, au cours de ces dernières années, de me demander comment on en était arrivé là. La réponse, je vais la découvrir en novembre 2021 en lisant un article du journal Le Monde dénonçant « une politique de dissimulation d’incidents de sûreté nucléaire ». Voilà la véritable raison de ce harcèlement. À ce moment précis, EDF a compris que je connaissais le pourquoi de ma situation et du traitement qui m’était infligé : des inspections trop gênantes lorsque j’étais inspecteur à l’Inspection Nucléaire, notamment sur le site du Tricastin en 2015 et 2018, et sur le site de Dampierre en avril 2017. Un harcèlement moral pour avoir effectué correctement son travail, je trouve cela injuste, mais un harcèlement moral ponctué, dans moins d’un mois, d’un licenciement à 52 ans, cela est tout simplement abominable et détruit une vie !
Le 20 décembre 2021, j’ai alerté l’ASN, qui est aussi notre inspection du travail, sur ma situation de harcèlement moral et cette véritable « chasse à l’homme » dont je faisais l’objet depuis mes années d’inspection à EDF. Loin de s’arrêter, ce harcèlement s’est poursuivi sur mon site actuel en Seine-Maritime, avec une plus grande violence encore depuis la parution de l’article précité. Nonobstant mes alertes réitérées, l’ASN n’a pris aucune mesure concrète afin de faire cesser ces agissements ni même me protéger.
Entre octobre 2021 et aujourd’hui, mes conditions de travail sur mon lieu de travail se sont substantiellement détériorées : demandes contradictoires de ma hiérarchie, agenda vide, absence d’accompagnement sur ma prise de poste, placardisation, aucune possibilité de me déplacer librement sur le site, ordre de ne rencontrer aucune autre personne, non-prise en compte des aménagements du médecin du travail, « flicage », non-assistance à personne en danger, mise en danger délibérée de la vie d’autrui, faux en écriture et faux témoignages, et même tentative d’obstruction à la venue des secours le 7 avril 2023 après une agression sexuelle par un médecin du travail lors d’une visite de pré-reprise sur le site de Paluel (76). Les quatre syndicats majoritaires (CFE, CGT, FO et CFDT) au niveau des sites nucléaires recevront l’ordre, directement de la direction d’EDF, de ne pas m’aider. C’est encore et toujours le cas aujourd’hui, et ce sont ces mêmes syndicats qui auront la mission de me licencier lors de ce conseil de discipline paritaire. Seul le syndicat SUD a tenté de m’épauler. Tout au long de ces cinq ans, j’ai essayé avec force de me reconstruire par des cures « psy » et des passages en maisons de repos, mais je me suis aussi détruit. Mes cinq tentatives de suicide et mes différents raptus suicidaires ont non seulement laissé EDF dans une indifférence totale, mais pire, l’entreprise n’a pas hésité à se servir de cette fragilité pour me « broyer » encore davantage lors de mes tentatives de retour à l’emploi. Ces méthodes de management par la terreur sont propres à EDF et sont malheureusement des « marqueurs » forts de ce que subira également le lanceur d’alerte « HUGO » du site du Tricastin.
Il y a trois semaines, j’ai alerté le PDG d’EDF, la DRH Groupe, ainsi que le Directeur de la DPNT, qui, de mai 2012 à 2017, a exercé les fonctions de directeur du cabinet civil et militaire du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian. Je n’ai reçu, pour toute réponse, qu’une notification de suspension accompagnée d’un passage en conseil de discipline pour fautes « graves » ou « lourdes ». De surcroît, EDF ne souhaite pas me communiquer les faits qui me sont reprochés, sachant que je n’ai été présent au travail que 6 jours en 2022 et 15 jours en 2023 !
Depuis la suspension de mes fonctions, j’ai donc décidé de ne plus m’alimenter correctement afin de dénoncer la façon dont mon entreprise tente de me licencier pour avoir rédigé des rapports dérangeants, notamment sur le site de Tricastin dont le directeur est toujours en poste alors qu’il est au centre d’une information judiciaire. La direction d’EDF préfère « tuer », « broyer » le lampiste et l’ingénieur que je suis afin de l’empêcher de parler.
Extrêmement affecté par ces agissements répétés, je vous demande, Mesdames et Messieurs les Députés, d’intervenir au plus vite afin de me permettre de poursuivre mon activité professionnelle au sein de l’entreprise dans des conditions normales de travail. Le seul fait qui peut m’être reproché est celui d’avoir réalisé mon travail d’inspecteur du nucléaire en toute indépendance, avec professionnalisme, et dans l’intérêt commun de la population.
Recevez, Mesdames et Messieurs les Députés, mes sincères salutations et mes remerciements pour le soutien que vous pourrez m’apporter.
BEGIN Arnaud,
Ingénieur, Expert Sûreté,
Seine-Maritime.
Il ne faut rien lâcher !