Le gendarme du nucléaire accusé d’en faire trop …

    Autrefois considérée comme un relais du «lobby atomique», l’Autorité de sûreté est désormais critiquée pour son zèle, nuisible au commerce.

    «L’Autorité de sûreté nucléaire ? Ses représentants sont souvent des ayatollahs. Or les chantiers et les installations qu’ils inspectent sont devenus tellement complexes qu’un peu plus de recul permettrait souvent un meilleur dialogue avec les industriels.» Celui qui parle, fin connaisseur du secteur, n’est pas le seul à ruer dans les brancards.

    «Bien sûr que l’Autorité passe les bornes !», s’énerve même un ministre. «Quand elle dit qu’elle ne veut pas d’autre réacteur que l’EPR (le réacteur français de nouvelle génération) à l’export, elle sort de son rôle. Elle doit valider des dossiers, pas faire la politique nucléaire de la France

    Quel chemin parcouru ! Il y a dix ans à peine, le gendarme du nucléaire était vilipendé par les écologistes comme un laquais du lobby nucléaire, pieds et poings liés au ministère de l’Industrie. Aujourd’hui, c’est le «lobby» qui voit le même gendarme comme un empêcheur de vendre des EPR en rond. À tel point que le rapport Roussely sur la réorganisation de la filière, dont une synthèse a été publiée par l’Élysée le 27 juillet, recommande de «réexaminer » la mission de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). «Il convient d’éviter que des événements de portée très limitée conduisent à jeter une suspicion injustifiée sur l’ensemble d’une technologie », lit-on dans ce résumé du rapport.

    Faiblesses informatiques

    La goutte d’eau qui fait déborder la cuve a été versée le 15 octobre 2009, un «événement » d’ailleurs évoqué dans le rapport Roussely. L’ASN publie, conjointement avec ses homologues finlandais et britannique, une lettre pointant les faiblesses informatiques du contrôle commande de l’EPR. La publication de ce courrier, bien plus que son contenu relevant du dialogue normal entre contrôleur et contrôlé, provoque un tollé dans le landerneau atomique, alors en pleine effervescence. Henri Proglio vient à peine d’arriver à la tête d’EDF et les négociations pour vendre quatre EPR à Abu Dhabi battent leur plein ! Et le 2 août dernier, l’ASN a encore enfoncé le clou. Tout en reconnaissant un «dialogue constructif» avec EDF concernant l’installation de Flamanville, le gendarme réclame «une modification d’une des plates-formes de commande du réacteur» EPR.

    Depuis dix-sept ans, l’ASN est incarnée par l’inamovible André-Claude Lacoste. «Il y a dix ans, Lacoste était une courroie de transmission de l’industrie, se souvient Yannick Rousselet, militant historique de Greenpeace. Il faisait des copier-coller des communiqués d’EDF et Areva. » La longue marche vers plus de transparence et d’autonomie du contrôleur franchit plusieurs réformes. Dernière étape, la loi de 2006. Celle-ci fait de l’ASN une entité administrativement indépendante, dirigée par cinq commissaires nommés pour six ans, et, depuis 2006, irrévocables.

    À 68 ans, André-Claude Lacoste, l’austère serviteur de l’État sorti de Polytechnique il y a un demi-siècle, est progressivement sorti de sa réserve de haut fonctionnaire. En 2002, le ministre Vert et antinucléaire Yves Cochet, profitant d’un des changements de statut de l’ASN, avait voulu le déloger. Au profit de Michèle Rivasi, fondatrice de la Crii-rad, ce laboratoire indépendant qui dénonça en 1986 la gestion de la catastrophe de Tchernobyl par l’État français. Mais au regret d’Yves Cochet, Lacoste fut maintenu, car, en cette époque de cohabitation «Olivier Schrameck (directeur de cabinet de Lionel Jospin) et Dominique de Villepin (secrétaire général de l’Élysée) faisaient la pluie et le beau temps sur les nominations », se souvient l’ancien ministre, à présent député écologiste.

    «Être capable de dire non»

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