Travail du dimanche : une loi pour rien? …

    La loi Mallié souffle discrètement sa première bougie, en pleine trêve estivale. Le comité parlementaire en charge du suivi de la loi a repoussé la publication de ses conclusions au mois d’octobre… Pas de bilan, donc, mais un état des lieux.

    Le texte avait déjà fait l’objet d’intenses polémiques avant même son entrée en vigueur le 10 août 2009. Il prévoit la possibilité d’ouvrir le dimanche pour tous les commerces situés dans les « communes d’intérêt touristique ou thermal » ou « zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente », et définit des périmètres d’usage de consommation exceptionnel (Puce), devant être caractérisés par des « habitudes de consommation le dimanche », dans les zones urbaines de plus d’un million d’habitants. A ce jour, seules les villes de Paris, Aix-Marseille et Lille sont concernées.

    La nouvelle loi permet aux salariés des Puce de bénéficier d’une rémunération double le dimanche et de repos compensateur, ce qui n’est pas le cas en zone touristique, où aucune contrepartie particulière n’est prévue, sauf accord spécifique avec l’employeur. Une différence de traitement dénoncée par les syndicats : à leurs yeux, la loi a avant tout creusé les inégalités entre salariés, en « créant des zones où les compensations sont différentes pour une même dérogation », regrettait encore récemment la CGT dans un communiqué.

    Un casse tête administratif

    La détermination d’une zone touristique s’avère souvent être un parcours du combattant : établie par le préfet sur la seule proposition des conseils municipaux, elle doit être validée par un accord avec les partenaires sociaux. Dans les faits, il semble que la loi ait surtout amplifié la complexité du sujet, et les affrontements entre les différents échelons administratifs sont légion.

    A Paris, le 8 juin dernier, la mairie demandait au préfet le classement en Puce des sept zones touristiques existantes. Celui-ci a refusé, jugeant que la loi Mallié ne permet pas une telle requalification. Bertrand Delanoë, estimant le nombre de commerces parisiens ouverts le dimanche suffisant (12 000 à 15 000 établissements, soit près de 20 % du total), a préféré insister sur les risques que ferait courir une telle évolution sociétale pour les familles. Le maire socialiste s’est en revanche montré ouvert à la possibilité d’accepter jusqu’à 10 ouvertures dominicales par an pour les grands magasins, alors que la loi n’en autorise que cinq aujourd’hui.

    Autre problème pointé depuis l’entrée en vigueur de la loi: la multiplication des ouvertures illégales de supérettes au-delà de 13 heures, horaire maximum autorisé pour les commerces de détail alimentaires.

    A Nice, la mairie a demandé à classer une partie de son centre-ville en zone touristique, mais la préfecture n’a toujours pas donné son accord. Dans la même région, à Gap, ce sont les commerçants qui ont refusé d’être classés en zone touristique, malgré la proposition de la préfecture.

    Parfois, ce sont même les grands groupes de distribution qui, après être parvenus à un accord avec leurs salariés et achevé les négociations avec les syndicats, doivent encore attendre le feu vert des préfets.

    Jean Dionnot, président du Collectif des amis du dimanche (CAD), considère que la loi Mallié a créé plus de problèmes qu’elle n’a apporté de solutions : « Les préfets succombent aujourd’hui à la pression des lobbys des grandes enseignes, les dernières parts de marché qu’il restait aux commerces de proximité sont en train de tomber dans l’escarcelle de la grande distribution. Le nombre de contentieux aujourd’hui est impressionnant, il faut impérativement revenir au principe démocratique du jour de congé commun. »

    Dans la réalité

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