Des fraudes et contrefaçons nombreuses, alerte l’ASN

    Fraudes, falsifications et contrefaçons. Trois termes qui collent à la peau du nucléaire depuis quelques jours et les propos du président de l’ASN, l’Autorité de sûreté nucléaire. Ce dernier a révélé qu’en 2023, 43 problèmes de ce type avaient été comptabilisés en France. Un nombre vraiment conséquent et des problématiques qui interpellent et posent la question de la sécurité de cette filière, pourtant vitale pour l’avenir énergétique français.

    Source : Nucléaire : des fraudes et contrefaçons nombreuses, alerte l’ASN | Choisir.com

    43 situations de fraudes et de contrefaçons détectées dans le nucléaire en 2023

    Voilà un constat et des propos qui n’ont rien de rassurant. Le 30 janvier 2024, Bernard Doroszczuk, président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), présentait ses vœux à la presse. L’occasion pour lui de révéler qu’en 2023, 43 situations de falsifications ou de contrefaçons ont été dénombrées au sein du parc nucléaire national.

    Un nombre loin d’être négligeable, au-dessus de la moyenne de ce que l’ASN a l’habitude de constater depuis la mise en place de son nouveau processus de contrôle. Bernard Doroszczuk a expliqué que ces fraudes pouvaient être vraiment variées et avaient notamment concerné :

    • des résultats d’essais modifiés dans le but d’être déclarés « conformes » ;
    • la découverte par les exploitants, lors d’essais complémentaires, « que les puces [électroniques] n’étaient pas câblées de façon conforme ». Voilà ce qu’a ajouté Stéphanie Guénot Bresson, commissaire à l’ASN.

    Le président du gendarme du nucléaire tricolore a souhaité insister sur ce problème de la contrefaçon. D’après lui, ce dernier pourrait vraiment devenir majeur puisque « les projets vont considérablement augmenter » dans le pays. Ses craintes sont donc liées à la politique de relance du nucléaire, désirée depuis le plus haut niveau de l’État. Dans ce cadre, la volonté de l’exécutif est de prolonger le fonctionnement des réacteurs français, très vieillissants, après 60 ans. Cette relance de l’atome en France doit aussi aboutir à la construction :

    • de 6 nouveaux réacteurs nouvelle génération (les EPR2), avec une option de 8 autres supplémentaires ;
    • de mini centrales modulables de type SMR, (pour Small Modular Reactor en anglais).

    La France se trouve en réalité face à un véritable défi énergétique. En effet, la consommation électrique va connaître une importante hausse d’ici 2035. Voilà pourquoi le gouvernement souhaite prioriser le développement rapide de ce type de productions décarbonées. Même si le premier de ces nouveaux EPR2 ne sortirait pas de terre avant, au minimum… 2035.

    Autre problème de cette relance du nucléaire, relevé donc par Bernard Doroszczuk : qu’elle soit synonyme de tensions sur la chaîne d’approvisionnement. À ses yeux, les « plannings […] peuvent être en tension eux-mêmes avec la volonté de faire vite ». D’où un impact redouté au niveau de la fourniture de tous les équipements nécessaires aux futures installations atomiques espérées.

    Ne pas « confondre vitesse et précipitation » et un appel à la rigueur comme à l’exigence : les demandes de l’ASN

    De ce fait, pour Bernard Doroszczuk, « il ne faut pas confondre vitesse et précipitation, surtout dans un domaine aussi sensible » que l’énergie nucléaire. La crainte du président de l’ASN : que cette course à l’atome désirée par l’exécutif ne provoque une hausse d’actes de falsifications volontaires à l’avenir. C’est pourquoi il met en garde contre le fait que cet engouement puisse se traduire « par un certain nombre d’opérations […] de :

    • contrefaçon ;
    • d’irrégularités ;
    • et de fraudes dans la filière ».

    Ainsi, Bernard Doroszczuk met l’accent sur une nécessité indispensable. À ses yeux, « la lutte contre les falsifications et les contrefaçons doit rester un point majeur de vigilance » pour l’ensemble du secteur nucléaire. Et ce « à tous les niveaux de la chaîne ». En 2023, les investigations réalisées par l’ASN avaient été déclenchées par :

    • des déclarations provenant de fabricants ou d’exploitants ;
    • des signalements obtenus grâce à un système d’alerte ad hoc.

    Ainsi, trois fraudes avérées ont même abouti à autant de signalements devant le procureur de la République. Pour 2024, le gendarme du nucléaire français a déjà ficelé son programme d’inspections. Des mots de son dirigeant, celui-ci prévoit :

    • un « volet risque de falsifications » ;
    • des vérifications au niveau « des facteurs organisationnels et humains ».

    Le but : comprendre avec plus de précisions « ce qui pourrait conduire soit une personne, soit une organisation à falsifier ou à cacher quelque chose ». Parmi les pistes possibles envisagées, Bernard Doroszczuk a cité des « craintes temporelles » ou le « silence organisationnel ». En clair : ne rien dire par crainte de subir les conséquences de ces révélations de dysfonctionnement.

    En tout cas, ces annonces aucunement rassurantes peuvent légitimement poser la question de la sécurité de la filière atomique. Le souhait du gouvernement est de miser prioritairement sur l’apport de nouvelles centrales nucléaires pour remplir ses objectifs de transition écologique et de neutralité carbone. Toutefois, avec ces fraudes et ces équipements non conformes ni réglementaires, qu’en est-il de la réelle sûreté des installations nucléaires ?

    Ces problèmes risquent de donner un nouvel argument de poids aux opposants de la filière et aux écologistes. D’ailleurs, pour ces derniers, le nucléaire n’est pas une vraie solution pour le climat ni la transition verte espérée. Une opinion de plus en plus répandue alors qu’on a assisté, en 2023, à une baisse « absolument spectaculaire » du nucléaire dans le monde.

    Un défaut de surveillance dans toute la chaîne de sous-traitance pointée du doigt

    Enfin, Bernard Doroszczuk a également tenu à souligner que le souci de l’ASN, dans ses investigations, était de vraiment parvenir à différencier :

    • « ce qui correspond à des erreurs », sans aucune intention de tromper ;
    • « et ce qui relève d’une volonté de falsifier, de volontairement déclarer quelque chose » de faux.

    En ce sens, l’Autorité de sûreté nucléaire s’est aussi penchée sur le cas de la surveillance à l’intérieur de la chaîne d’approvisionnement. Cette dernière est « une obligation de l’exploitant et de ses sous-traitants », par l’intermédiaire d’une procédure « en cascade ». À chacune des étapes de l’approvisionnement, chaque intervenant est en réalité responsable du contrôle des fournisseurs et sous-traitants qui lui ont directement précédé.

    Cependant, Bernard Doroszczuk a indiqué, avec regret, qu’il existait « un manque de rigueur dans la totalité de la chaîne de sous-traitance ». Cette remarque implique donc que cette « surveillance en cascade » est loin d’être efficace. Avec ce détail pointé du doigt par le patron de l’ASN : certains fournisseurs conçoivent des équipements sans même savoir qu’ils vont être utilisés dans l’industrie nucléaire !

    Un rappel s’impose dès lors : il faut que les « exigences à respecter » soient connues et maîtrisées par l’ensemble de la chaîne. Cela paraît quand même être une base indispensable pour ce secteur de pointe comme le nucléaire. Selon Bernard Doroszczuk, « c’est possible, mais il faut se mobiliser ». La sécurité énergétique française, présente et future, en est à ce prix.

    Actuellement, le domaine de l’atome est aussi frappé par une augmentation énorme des tarifs de l’uranium, au plus haut depuis 2007. Le prix de la livre d’uranium avait effectivement, en janvier, dépassé les 100 dollars, une première depuis 17 ans. Heureusement, cette forte progression ne devrait pas avoir d’impact significatif sur le prix de l’électricité, déjà en hausse de 8,6 % et 9,8 % depuis le 1er février 2024. Dans ce contexte d’inflation, vous souhaitez peut-être comparer les offres afin d’en trouver une moins chère chez un autre fournisseur ? C’est exactement ce que vous propose le Comparateur Énergie de Choisir.com. Grâce à cet outil gratuit et sans engagement, souscrivez facilement à un contrat qui correspondra à vos besoins !

      Laisser un commentaire

      Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

      Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.