La bombe des egos est-elle désamorcée ?…

    L’annonce par l’Elysée d’une série de décisions du conseil de politique nucléaire vise à mettre fin à la cacophonie, voire la guerre ouverte, entre EDF et Areva. Certains veulent y lire une victoire d’Henri Proglio. La réalité est plus compliquée : il faut dépasser les conflits de personnes pour examiner les enjeux économiques et industriels.

    Ces derniers mois avaient été rythmés par la rivalité personnelle entre les PDG d’EDF et d’Areva, Henri Proglio et Anne Lauvergeon, mais aussi l’échec dans la compétition pour quatre réacteurs à Abu Dhabi, remportée en décembre 2009 par les Coréens, et un différend ancien sur le retraitement des combustibles nucléaires dans l’usine de La Hague.

    La situation était intenable pour les deux entreprises, dont l’Etat est actionnaire ultra-majoritaire. Pour préparer le terrain, une mission avait été confiée à François Roussely, ancien président d’EDF, qui a rendu son rapport en mai. Les décisions annoncées mardi par l’Elysée en reprennent les principales propositions.

    EDF chef de file à l’exportation : logique !

    Peu de détails sont fournis sur les modalités du « partenariat stratégique » annoncé entre les deux groupes. La prééminence donnée à EDF concerne principalement les négociations commerciales à l’exportation, autour d’« une organisation s’appuyant sur la compétence d’exploitant et d’architecte-ensemblier d’EDF ».

    Rien que de très logique ! Un client étranger ne souhaite pas acquérir un équipement en tant que tel, mais une capacité de production d’électricité pendant trente ou quarante ans. Sur ce point, l’expérience, les compétences accumulées depuis cinquante ans par EDF sont décisives. Anne Lauvergeon avait d’ailleurs regretté le refus initial et l’implication trop tardive de l’électricien dans l’offre française à Abu Dhabi. Faire d’EDF le chef de file de l’industrie nucléaire française à l’exportation apparaît donc logique, et ne devrait pas soulever de problème.

    Sur plusieurs autres points, Areva et sa dirigeante sont en réalité confortés. Personne n’a oublié dans ce milieu les déclarations fracassantes d’Henri Proglio : quelques jours après son arrivée à la tête d’EDF, il réclamait un mécano industriel redéfinissant le périmètre des entreprises, avec le transfert dans son groupe de certaines activités d’Areva.

    C’était en complète opposition avec la stratégie industrielle mise en œuvre depuis une décennie par Anne Lauvergeon, celle d’un groupe intégré de l’amont à l’aval du cycle du nucléaire. Comme la proposition d’Henri Proglio n’a pas été reprise par l’Elysée, cela signifie que l’unité, les frontières et le champ d’activité d’Areva sont finalement confirmés et consolidés.

    Concernant l’amont du cycle, la formule sibylline d’un accord visant « à conforter la sécurité et la compétitivité de l’approvisionnement en combustible » laisse entendre qu’une solution a été trouvée à une importante source d’incertitude pour Areva. Le groupe réalise entre 25% et 30% de son chiffre d’affaires avec EDF. Mais sous l’effet d’une concurrence accrue, EDF achète désormais un peu moins de 50% de son combustible à Areva.

    EDF et Areva ont des priorités différentes

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