Nous l’ignorions, mais notre président, c’est Eugène Saccomano.
Car si Sarkozy a annulé tous ses rendez-vous du 24 juin, ce n’est pas pour se réserver une réaction face aux manifestations et à la contestation sociale, mais pour causer football avec Thierry Henri.
Minable.
Eh bien oui, je n’aurais jamais cru assister, un jour, en France, à une telle scène : le chef de l’Etat, confronté à une importante journée de contestation sociale, annulant des rencontres avec des ONG et des personnalités étrangères, non parce qu’il entend prendre le temps d’analyser les causes de ce malaise, mais pour recevoir d’urgence un joueur de football en compagnie de qui il a entrepris de refaire les matchs que la France a perdus.
Et cela pour le grand bonheur de TF1 qui, du coup, a pu marginaliser les défilés syndicaux.
Jusqu’à présent, un président qui s’instaure lui-même « caudillo » de l’équipe nationale de foot de son pays, cela ne s’était vu que dans des républiques bananières.
Donc, comme on le pressentait, la journée syndicale de protestation contre la réforme des retraites a mobilisé des foules sans doute trois fois plus importantes que les tristounettes démonstrations précédentes.
Habitant près de la place de la République, je suis devenu un expert de la chose. Incontestablement, la manifestation parisienne a été d’assez grande ampleur.
Autour de 100 000 manifestants (les 45 000 selon la police, c’est ridicule !).
Quelques remarques : contrairement à ce que j’avais anticipé, la tonalité anti-sarkozyste de ce défilé était très forte, parfois violente, ici et là excessive (comparaison avec Pétain), mais restait sur le terrain social.
Par exemple, peu de globalisation intégrant les affaires ou les scandales récents.
Eric Woerth était finalement peu à l’honneur (là-dessus je me suis donc trompé), pour d’ailleurs une bonne raison c’est que le quasi-étouffement médiatique ayant jusqu’ici assez bien fonctionné (ça commence à changer), beaucoup des « protestataires » n’étaient tout simplement pas au courant ou n’y comprenaient pas grand-chose.
En revanche, l’hostilité à l’égard des médias était tangible et, en particulier, plusieurs cameramen, y compris de Canal+, m’ont fait part de fortes tensions avec la foule.
J’ai bizarrement eu deux sensations contradictoires : d’un côté un aspect bon enfant, de l’autre beaucoup de rages rentrées.
En résumé, une impression de mi-temps. Ou bien ça retombe, ou bien cela peut prendre, à la rentrée – après globalisation justement des mécontentements et des rejets –, une ampleur beaucoup plus considérable.