Pourquoi sortir du NUCLÉAIRE sous l’ère Macron ?

    32 ans d’EDF, 32 ans dans l’industrie nucléaire, aujourd’hui lanceuse d’alerte

    Chimiste, cheffe de laboratoire, formateur et concepteur de formation, appui chef de service chimie-environnement en CNPE, vous trouverez ici la réalité de l’industrie nucléaire vue de ma fenêtre.

    Sophie Dejoué

    Avertissement : Si certains peuvent penser qu’en tant qu’agent EDF je crache dans la soupe ou que je renie mes origines, qu’ils se rassurent il n’en est rien !
    Car, s’il est entendu qu’il est impossible, -et qu’il n’est pas souhaitable- de faire abstraction de sa propre histoire et de 32 ans de chimie dans l’industrie nucléaire en CNPE – en effet ça marque ! – il reste pertinent d’avoir une réflexion et un esprit critique sur l’évolution et la tournure que prend l’entreprise EDF. Car, en prenant du recul, en faisant abstraction de sa propre situation, on n’est jamais aussi bien servi que par le milieu dans lequel on vit 8 heures par jour depuis 32 ans.
    Dans l’analyse qui suit, il n’est pas question de technologie : nul doute que la technologie nucléaire du PWR utilisée par la France depuis 1979 n’est pas à remettre en cause sur tous les plans, comme peuvent le faire les écologistes engagés. Elle a honorablement sauvé la France d’un péril énergétique après le choc pétrolier de 1974 en lui conférant son autonomie énergétique. Cette énergie a incontestablement contribué à l’ère des 30 glorieuses et continue à nous servir.
    Mais aujourd’hui, cette même industrie Nucléaire Civile, dont les CNPE (Centre Nucléaire de Production d’Électricité), prévus pour 40 années de fonctionnement, subsistent à coup de « grand carénage », d’enfumage en tout genre (scandale des forges du Creusot) et de falsifications à l’ASN, dixit plusieurs lanceurs d’alerte, etc. Sans oublier les déclarations de cette chère Barbara, qui après avoir incendié EDF dans un rapport de 2018, l’encense dans l’espoir de faire tenir les 56 réacteurs en fonctionnement jusqu’à après le déluge !
    Le plan Messmer fut indéniablement une bonne chose pour la France. Des ingénieurs, techniciens, ouvriers, manœuvres se rendirent tous pionniers du nucléaire Français se jetant à corps perdu, avec engouement dans cette nouvelle aventure, ce nouvel Eldorado : la technologie PWR qu’ils ont fait leur, le REP (Réacteur à Eau Pressurisée). Et ils ont bien fait. Les 58 réacteurs – du 900 MW au 1450 MW- ont été construits et mis en service entre 1979 et 1997, soit 58 réacteurs en 18 ans pour une capacité de 60600 MW, un montant de 96 milliards, soit 1,7 milliard d’euros par réacteur.
    Cette réussite n’est que l’affirmation, une fois encore, qu’une technologie ne saurait se suffire à elle seule. Sans l’intelligence collective, la mise en commun des savoirs, elle n’existerait pas, voire utilisée uniquement à des fins destructrices… L’histoire l’ayant tristement montré.
    Concernant les CNPE, l’implication synchrone de tous les personnels, de tous les métiers, des soudeurs, des chaudronniers, des robinetiers, des chimistes, des essayeurs,… Ces métiers manuels qui à l’époque étaient tous agents EDF – dont on peut se demander s’ils existent encore dans le dictionnaire du Big Brother Macron, car aujourd’hui métiers méprisés réservés aux travailleurs détachés- ses ingénieurs, ses chercheurs, a permis à la France de construire le parc nucléaire qu’on lui connait, symbole de son indépendance énergétique. Tous ces personnels qui ont mis leur savoir-faire en commun, au service du commun, ont réalisé un exploit qui fait la fierté de la France depuis plus de 40 ans. Sans ses Hommes et leur engagement, il n’en aurait rien été. Mais ça, c’était il y a 50 ans !
    Mais que c’est-il passé depuis en France ?
    Rien ! Puis, une certaine Anne en odeur de sainteté auprès d’un certain Mitterrand aurait abusé de ses charmes pour refiler un EPR fait de bric et de broc au gouvernement Français.
    En effet, depuis 2007, la France ne fini pas d’espérer de voir un jour la mise en service de l’EPR de Flamanville 3, soit la production d’une capacité de 1600 MW en 15 ans pour plus de 20 milliards d’euros…
    Depuis 2007, pas un MW n’a été produit par ce réacteur -dont la mise en service est sans cesse repoussée- pour un rapport d’investissement de 1 à 12… !
    Quelle régression, comment ne pas en avoir la nausée ?
    Alors, où sont passés ces savoir-faire !!
    De la construction à l’exploitation des 58 réacteurs (non, 56 aujourd’hui -Merci Macron ! Merci Macron… quel plaisir de travailler pour vous auraient chanté les charlots !!!) au tonneau des danaïdes de l’EPR, que s’est-il passé ? Il y a de quoi se poser des questions, surtout à l’ère de « l’homme augmenté » si cher à Laurent Alexandre.
     En toute logique, en 2022 cette énergie « nucléaire » devrait être une énergie de transition avant de passer à mieux. Car faute d’avoir mené une vraie politique énergétique pour la France et d’avoir investi dans la recherche sérieusement, force est de constater que nous en sommes au même point qu’en 1974. Il est indéniable qu’actuellement cette énergie rend bien service, « qu’elle nous évite de pédaler dans nos caves », mais ne nous voilons pas la face, elle a bien des défauts, et pas des moindres.
    Tous nos chercheurs savent que l’on peut faire mieux et notamment plus propre et plus vertueux si on leur donne le temps et l’argent pour le faire. Pour cela, il faudrait investir dans la recherche plus scrupuleusement -sans même parler du projet Astrid que Macron a fait arrêter-, laissant les chercheurs chercher plutôt que de les forcer à passer du temps à se prostituer pour lever des fonds s’ils veulent faire de la recherche…, à chacun son métier.
    Bref, il me semble avoir vécu l’ère des passionnés de l’atome où tous les « petits » et « grands » métiers -autrement dit les métiers manuels et intellectuels- étaient utiles, honorables et complémentaires -comme en cuisine, le plus grand chef n’est rien sans ses « petites mains »- où, vous chimiste, en parlant avec votre collègue chaudronnier cela représentait un gain de temps et un enrichissement mutuel permettant que chacun devienne plus efficace ensemble. Une ère pendant laquelle nous grandissions ensemble avec un référentiel commun pour un bien commun.
    Il est vrai que tout n’était certainement pas aussi idyllique que j’aime à le décrire, -les syndicats veillaient et la lutte des classes s’avérait bien présente-. Les rapports de forces étaient rudes et musclés, mais il me paraît que l’on faisait la distinction entre le travail et les convictions politiques. Nous avions un socle commun de valeurs vis-à-vis de la qualité du travail, ces dernières étant le fruit d’une éducation commune. Le respect se révélait être de mise, quand nous étions au boulot, nous étions au boulot pour faire fonctionner la machine et produire intelligemment ; même si on pouvait se « foutre sur la gueule pour des idées et des idéaux », le plus souvent respectueusement ; parfois moins, mais jamais sans éborgner personne ou arracher des mains, me semble-t-il.
    C’est sûrement toutes ces valeurs « travail » que je souhaitais voir transmettre du nucléaire à la française.
    Chaque travail avait une utilité propre, donc du sens, car il avait un rôle individuel au sein d’un collectif. La reconnaissance venait du fait que vous aviez un savoir-faire et une utilité pour l’entreprise et non du fait que vous êtes un lèche-cul à la botte de votre hiérarchie incapable de décrire ce que font vos équipes pour l’entreprise. Ainsi, à l’ère du QR code, l’outil managérial a remplacé votre personnalité au sein d’une équipe de collègues de travail.; dans les faits, une case Excel a remplacé votre humanité au sein d’une section de collaborateurs .
    Il apparait alors que les cerveaux de nos managers aient été remplacées par le tableau Excel, le QR code cher à Macron, en d’autres mots que nos élites aient fait de ce qui devait être qu’un outil, un objet de commandement.
    Alors, j’en reviens au titre de cet article :
    « Pourquoi sortir du nucléaire sous l’ère macron »
    Je vous invite à imaginer quelques instants la gestion des conséquences et la communication – et si ce n’était que la communication cela serait un moindre mal- d’un accident nucléaire d’ampleur -type tempête de Blayais, Three miles Island, Techernobyl ou Fukushima-, pour ne citer que les plus marquants, révélés au grand public …- par cette macronie maltraitante. On peut penser sans trop s’avancer qu’elle serait gerée par ce gouvernement de la même façon que la syndémie du covid. Cela n’aurait sans doute pas les mêmes conséquences, qui je crains seraient bien plus graves. Mais imaginons:
    Avant toute chose, en toute évidence, toutes les instances de « gestion de crise » qui s’entrainent tout au long de l’année seraient évincées.
    1)   Il s’en suivrait la mise en place d’un état d’urgence.
    2)    Puis, la création d’un « Conseil de guerre »,… couvert par le secret défense. En toute transparence !!
    3)   Création d’un « conseil scientifique » avec des « experts » extirpés du cimetière des éléphants de l’avenue de Wagram et de l’ASN. Pour mémoire, Ces derniers ont quitté l’exploitation après des faits de corruption comme Philipe. S, Pascal. P, Dominique. M qui ont transité d’EDF, à OPG au Canada pour se faire oublier avant de revenir à la SFEN où encore à la DPN.
    4)   La substitution d’autorité de l’ASN par le comité Théodule.
    5) L’envoi à l’aveugle des agents sur les lieux de l’accident.
    5)   La délégation de la communication de crise au cabinet Mac Kinsley,
    6)   De même que la « gestion des populations », les évacuations, mises à l’abri, masques ( !!), distribution des pastilles d’iodes, confinement…
    7)   Établissement d’auto-autorisation de sortie des abris pour aller chercher le pain ! avec ou sans masque !
    8)   Mise en place d’un « Pass radiologique » avec injection répétée d’un vaccin à base d’iode et un QR code.
    9)   Etc ,etc,…
    Bref je fais confiance à la médiocrité de ce gouvernement pour avoir toutes les idées saugrenues possibles et imaginables, pour nous mentir encore et encore, nous parquer toujours plus, nous anéantir si possible. Mais je ne fais nullement confiance à ce gouvernement pour gérer un éventuel accident nucléaire.
    En conséquence, je crois sincèrement que pour une fois, il serait bon de suivre les fabuleux préceptes de Sieur Castex qui affirmait qu’en temps de covid « le mieux était de ne pas tomber malade » ; et qu’aujourd’hui « le mieux serait sincèrement de ne pas avoir d’accident nucléaire », en d’autre termes d’abandonner l’idée même de construire de nouveaux EPR!
    Sophie Dejoué, le 12 février 2022

    Source : EDF ou la déconstruction des savoir-faire par l’externalisation du risque social ~ Pourquoi sortir du NUCLÉAIRE sous l’ère Macron ?

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