Un rapport parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires vient d’être rendu public, après cinq mois d’enquête. Au-delà de la question des attaques terroristes, le rapport explique surtout les risques que les entreprises du secteur font courir aux salariés et à la population par leur irresponsabilité, en particulier en cherchant à faire des économies avec le recours à la sous-traitance.
À la suite de la catastrophe de Fukushima en 2011, les autorités françaises ont interdit à EDF d’avoir recours à plus de deux niveaux de sous-traitance. En effet, la catastrophe japonaise avait été aggravée par l’irresponsabilité de l’opérateur privé, Tepco, qui gérait la centrale mais ne maîtrisait plus du tout certaines opérations importantes, confiées à une sous-traitance en cascade.
Mais le rapport montre que l’amélioration n’a eu lieu que sur le papier, comme le savent au quotidien les travailleurs du nucléaire. EDF fait appel à 2 500 entreprises sous-traitantes, qui assurent 80 % de la maintenance des centrales, et le justifie par la technicité et la spécialisation de certaines tâches.
Cela peut se comprendre s’il s’agit par exemple d’avoir recours aux meilleures équipes de soudeurs, ou de faire contrôler la qualité des soudures par des entreprises spécialisées. Mais, il s’agit surtout dans les faits de réduire les coûts. Les témoignages recueillis par la commission d’enquête montrent le décalage entre le discours rassurant d’EDF et la réalité. Les travailleurs qui interviennent dans les centrales lors des arrêts de tranche sont souvent précaires, pas forcément prévenus des risques, et sous pression de leur hiérarchie. Les salariés d’EDF occupent de plus en plus des fonctions de contrôle, d’encadrement de prestataires. Or une véritable sûreté des installations nécessite que la moindre erreur soit déclarée, pour pouvoir la corriger si nécessaire, et ce n’est souvent pas le cas, la logique commerciale poussant les entreprises sous-traitantes à la dissimulation. Le problème n’est pas tant la sous-traitance que la loi du profit, avec son chacun pour soi et l’irresponsabilité qu’elle entraîne.
Et il n’y a pas que la sous-traitance. Un scandale a éclaté quand on a appris qu’Areva avait caché pendant des années les non-conformités des pièces de tuyauterie destinées aux centrales nucléaires produites dans son usine du Creusot. Mais combien d’autres affaires sont restées couvertes par le secret industriel ?
Les auteurs du rapport demandent un renforcement des pouvoirs de l’Autorité de sécurité nucléaire et un plus grand contrôle démocratique sur la filière nucléaire. Mais sans une mobilisation et un contrôle par les travailleurs concernés eux-mêmes, accompagnés d’une protection pour ceux qui lanceraient des alertes, cela risque de rester des vœux pieux.
Source : Centrales nucléaires : les capitalistes nuisent à la sûreté | Le Journal Lutte Ouvrière
Soutien à Gilles Reynaud
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