EPR : l’accident de Taishan serait dû à un défaut de conception…la cuve !

    En juillet dernier, en Chine, la centrale nucléaire de Taishan était mise à l’arrêt. Quelques semaines plus tôt, un incident avait eu lieu dans l’unique centrale EPR en service au monde, conçue conjointement par le chinois CGN et le français EDF. En cette fin novembre, peut-être enfin une explication : l’incident serait dû à un défaut de conception de la cuve, selon une importante association française spécialisée dans la sûreté nucléaire.

    L’incident qui a conduit en juillet à l’arrêt d’un réacteur à la centrale nucléaire EPR de Taishan, dans le sud de la Chine, serait dû à un défaut de conception de la cuve, a affirmé samedi l’association française CRIIRAD.

    La Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (CRIIRAD) tiendrait ses informations d’un « lanceur d’alerte« .  « Il s’agit d’un Français qui travaille dans l’industrie nucléaire, ayant accès à des éléments techniques très précis sur la situation du cœur du réacteur de Taishan 1« , a précisé à l’AFP un responsable de la CRIIRAD. Taishan, c’est l’unique centrale EPR (réacteur à eau pressurisée) dans le monde, dotée de deux réacteurs. Quatre autres réacteurs EPR sont en construction, tous en Europe : un en Finlande, un en France à Flamandville et deux en Angleterre

    C’est un problème de conception de cuve qui serait à l’origine de l’incident à Taishan signalé le 14 juin 2021. Il s’agit d’une première explication.

    La cuve, c’est quoi ?

    La cuve du réacteur nucléaire n’est ni plus ni moins que le coeur du dispositif. Sur le site du fabricant de centrales français Framatome, on peut ainsi lire qu’il s’agit de « l’équipement au sein duquel l’eau du circuit primaire est chauffée au contact du combustible nucléaire. L’eau du circuit primaire va ensuite circuler vers les générateurs de vapeur pour transférer sa chaleur à l’eau du circuit secondaire, transformant cette dernière en vapeur. La vapeur ainsi créée alimente ensuite une turbine, reliée à un alternateur pour produire l’électricité« . En résumé, une cuve qui dysfonctionne, c’est une centrale en panne. D’ailleurs, précise un site gouvernemental français consacré au sujet, « contrairement à d’autres appareils du circuit primaire, comme les générateurs de vapeur ou les couvercles de cuve, le remplacement d’une cuve n’est pas une opération envisagée par EDF« . En clair, la durée de vie d’une centrale est liée à la durée de vie de sa cuve. Dans une centrale EPR, les technique de pressurisation d’eau sont différentes mais la cuve joue un rôle tout aussi fondamental.

    Sur le site de Framatome
    L’institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN)

    La centrale nucléaire EPR de Taishan a été construite avec le groupe français EDF. L’opérateur chinois CGN, exploitant principal de la centrale (70% des parts) avec EDF (30%), avait annoncé le 1er juillet « mettre à l’arrêt pour maintenance » le réacteur 1 de la centrale nucléaire EPR de Taishan, proche de Hong Kong.

    L’incident avait été signalé le 14 juin: un petit nombre de barres de combustible d’uranium endommagées (« crayons« ) causait une accumulation de gaz rares radioactifs dans le circuit primaire, étanche, de la centrale. Les autorités avaient qualifié le phénomène de « courant » et écarté tout danger.

    Dans un communiqué, les autorités chinoises expliquaient alors que l’augmentation de la radioactivité dans la centrale se situait « dans la fourchette réglementaire » mais « il n’y a pas de fuite radioactive dans l’environnement« .

    Des « vibrations anormales« 

    Dans son courrier, la CRIIRAD écrit, sur la foi d’informations transmises par ce lanceur d’alerte, que ces « dégradations constatées sur les assemblages de combustible nucléaire (…) sont dues principalement à des vibrations anormales » de ces assemblages. Et que celles-ci « seraient liées à un défaut de la conception de la cuve de la filière EPR« .
    Toujours selon la CRIIRAD, des « résultats des essais sur maquette 0.2 » chez l’équipementier nucléaire Framatome au Creusot (France), dès 2007-2008, auraient révélé ces insuffisances sur l’hydraulique de la cuve.

    L’association demande ainsi à l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), entre autre chose, si elle a été informée « de la détection d’un niveau anormal de vibration des assemblages de crayon à Taishan« . L’ASN, contactée par l’AFP, n’a pas souhaité s’exprimer.

    « Le travail d’inspection du combustible et de la cuve du réacteur 1 de Taishan, lancé dès le déchargement, est toujours en cours. L’origine de l’inétanchéité de crayons combustibles ne sera déterminée qu’au terme de ces expertises« , a indiqué EDF.

    La Chine compte une cinquantaine de réacteurs en fonctionnement, ce qui la classe au troisième rang mondial derrière les Etats-Unis et la France. Avec Taishan, elle abrite le seul réacteur EPR opérationnel au monde actuellement. Le chantier d’un autre EPR, à Flamanville dans le nord de la France, a pris beaucoup de retard et cristallise les critiques des opposants au nucléaire.

      2 comments for “EPR : l’accident de Taishan serait dû à un défaut de conception…la cuve !

      1. dioduremétalik
        1 décembre 2021 at 14h19

        exposé clair,
        après la théorie pourrait venir la pratique ? Une chance pour les fanatiques, des petites pastilles existent ! Y en a t’il en stock ? est-ce un investissement d’avenir ?

      2. exosphene
        29 novembre 2021 at 17h28

        Un défaut conceptuel peut prendre des proportions catastrophiques, surtout s’il intervient sur le principal élément de l’installation qui est indémontable et c’est le cas !!! Cela ingénieurs et techniciens le savent, il y a fort à parier qu’ils y ont été très attentifs lors des essais.

        L’équipementier nucléaire Framatome au Creusot (France), dès 2007-2008, auraient révélé ces insuffisances sur l’hydraulique de la cuve.

        L’utilisation du conditionnel et du mot insuffisance respire les tournures managériales quand il y a de la gêne. Insuffisances est un terme utile et pratique pour relativiser les choses. C’est un peu comme les défauts d’étanchéité, quand tu as un trou gros comme le poing dans une canalisation, défaut d’étanchéité ne me semble pas vraiment être le terme approprié pour faire part de l’urgence du problème, mais c’est l’usage de la maison.

        La vraie question est :
        Si ces « insuffisances » ont été identifiées, quelle est la pertinence des données qui justifient la décision de ne pas modifier la conception de la cuve.

        Les problèmes de vibrations attachés à la conception de la cuve ne sont en rien anodins surtout s’ils peuvent devenir sources de rupture de gaines, il faut bien appeler un chat, un chat à un moment donné.
        Incompétence, négligence, allez savoir.

        Mais le doute plane parce que la situation n’est pas sans précédent et c’est bien légitimement que les questions de dissimulation voire de falsification se posent : Seraient-elles le résultat d’ordres visant à s’épargner un coût de modification conceptuelle trop lourd ?

        L’expérience nous a montré qu’en pareil situation, le management ne s’embarrasse d’état d’âme et prend le risque, en s’armant de méthodes peu scrupuleuses et de l’aléa moralité qui lui garantit une impunité pour que ça passe. Cela est monnaie courante au sein de ces géants qui jouissent de garde-fous à de très hauts niveaux, tout acquis à leur cause.

        Cependant si un lanceur d’alerte se manifeste, c’est que le sujet était connu en interne et il est fort probable qu’il ait été traité avec « discrétion », avec les méthodes que l’on connait au nom de l’omerta inhérente au secret des affaires, du secret défense, et de la sacrosainte fission. Amen ! La messe est dite, circulez il n’y a rien à voir.

        Le nucléaire aujourd’hui vit dans le paradoxe de sa politique d’entreprise qui l’amène à devoir considérer comme parias, tout Professionnel qui exerce honnêtement son travail, parce qu’il prévient de résultats qui ne sont pas conformes à ceux attendus. Mais comme cela coûte très cher, la tendance à arrondir les angles est devenu une culture que chacun pratique à son niveau, une forme d’autocensure que certains n’hésitent pas à s’imposer pour ne pas avoir de problème avec son manager. Mais cela vous le savez tous, puisque c’est votre pain quotidien.

        L’épuration éthique programmée par la sélection psychologique approfondie des équipes et du personnel recruté souffre d’un terrible biais idéologique : Le jeu de collage d’étiquette qui invite à prêter des intentions malsaines sur la base d’un postulat comportemental non conforme au formatage d’entreprise est un désastre. Prendre des Professionnels compétents qui font preuve d’un fort caractère critique afin d’éviter les conneries, pour des emmerdeurs et des grandes gueules, est une grave erreur. Les virer est encore pire parce qu’eux se battent pour que l’entreprise ne fasse pas n’importe quoi.

        A promouvoir que des carriéristes intéressés obnubilés par des objectifs. Objectifs souvent atteint en interprétant de manière très orientée certains résultats, pour mieux plaire à leur hiérarchie et arriver à leur fin. Nous arrivons à un système où la vue objective disparaît pour laisser place à des spéculations empruntent d’idéologie partisane et cela à tous les différents niveaux. Mais cela plait aux Directions qui pullulent de Directeurs Managers issus de ce même système qui s’est déployé, sévit et dérive depuis une bonne vingtaine d’année.

        Cela fait des lustres que le personnel le dénonce, ce système est dangereux parce qu’il génère un risque systémique et désolé de le dire mais L’EPR est le fruit de tout ce système, et tous les défauts qui s’accumulent et remontent aux yeux du public n’en sont que les témoins qui s’allument les uns après les autres.

        Tout ce système aujourd’hui menace d’effondrer économiquement EDF.

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