Les laboratoires internes EDF pointés du doigt par l’ASN .

    Radioactivité : l’ASN met les laboratoires d’EDF à l’amende

    Le 13 janvier 2009 par Rédaction L’Usine Nouvelle

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    Les laboratoires internes d’EDF ne sont plus agréés pour les mesures de tritium et de radioactivité bêta dans l’eau et dans l’air, autour des centrales nucléaires. L’autorité de sûreté nucléaire leur demande de revoir leur copie.

    L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) serre la vis. Après la série d’incidents nucléaires survenus durant l’été 2008, et l’appel du ministre de l’Environnement Jean-Louis Borloo à faire progresser la sûreté du nucléaire en France, elle durcit les mesures de contrôle. Elle a ainsi rendu obligatoire, à compter du 1er janvier 2009, une procédure d’agrément des laboratoires mesurant la radioactivité dans l’environnement.

    Le parc national électronucléaire EDF, composé de 58 réacteurs à eau sous pression (REP) répartis sur 19 sites, fait l’objet de deux types de contrôles. D’une part, les effluents usés (eau borée de la piscine, eau circulant dans la cuve…) sont stockés dans des réservoirs, le temps que leur radioactivité diminue et se situe en-dessous des limites de rejets autorisées, pour ne pas marquer l’environnement. Cette radioactivité fait l’objet d’un premier cycle de contrôles.

    D’autre part, l’environnement à proximité de la centrale (eau, air, végétaux, fermes, puits…) fait l’objet de mesures comparant les rayonnements ionisants observés à l’instant « t », au bruit de fond, correspondant à la radioactivité naturelle du site. C’est sur ce deuxième type de surveillance que les laboratoires internes d’EDF ont été épinglés.

    Double épreuve. Pour obtenir l’agrément, les laboratoires doivent désormais passer deux tests. Ils doivent d’abord démontrer leur capacité d’organisation en termes d’assurance qualité, c’est-à-dire être organisés de façon conforme à la norme ISO17025/CEI.

    L’évangile selon l’ISO/CEI 17025

    Accréditer son laboratoire selon l’ISO/CEI 17025 : un chemin de croix? Il s’agit d’attester de la compétence technique et de la fiabilité des résultats de son laboratoire. L’accréditation est décernée par le COFRAC, l’autorité de normalisation dédiée. Sont passés au crible : l’organisation et le système qualité, la maîtrise de la documentation, le personnel, l’installation et conditions ambiantes, les achats de services et de fournitures, l’équipement, la traçabilité du mesurage, l’étalonnage et le raccordement, la manutention des objets d’essais et d’étalonnage… Bref, un audit en bonne et due forme qui ne laisse rien au hasard.

    D’autre part, les laboratoires doivent réussir l’essai d’intercomparaison. En pratique, l’IRSN envoie des échantillons mystère, tous identiques, aux laboratoires qui analysent la radioactivité pour le compte de l’exploitant EDF. Lorsque les laboratoires internes d’EDF ont déposé en 2008 des demandes d’agrément, ils ont fait deux erreurs dans leurs analyses d’échantillons. En termes de traitement du signal, ils n’ont fait aucune discrimination entre les rayons alpha et les rayons bêta. Par ailleurs les appareils étaient mal calibrés : les conditions d’étalonnage étaient différentes des conditions dans lesquelles ont été réalisées les mesures. Certes, « la marge d’erreur était de 10% à 20%, marge qui permet tout de même de détecter des anomalies en termes de radioactivité », précise Julien Collet, directeur de l’environnement et des situations d’urgence de l’ASN. Mais les erreurs étaient manifestes.

    La commission a dit non. Une toute nouvelle commission d’agrément pluraliste (administrations, associations, représentants des laboratoires, IRSN, experts qualifiés …) est désormais en place : elle est chargée d’émettre un avis sur la qualité technique des demandes d’agrément. Après avoir instruit au second semestre 2008 les demandes d’agrément de laboratoires EDF qui ont mis en évidence des erreurs, l’ASN a soumis les résultats à cette commission, sous forme de dossiers anonymes. Entre-temps, EDF avait tenté de rectifier le tir, en présentant un plan d’action correctif. Niet, rétorque la commission. Après cet avis défavorable de la commission d’agrément, l’ASN a refusé le 16 décembre 2008 les nouvelles demandes et suspendu les agréments d’EDF en cours.

    Une commission d’agrément qui se veut pluraliste

    Parmi les membres de la commission d’agrément, beaucoup de ministères, quelques associations : l’ASN, le ministère de l’environnement , le ministère de la santé, la répression des fraudes du ministère de la consommation, le ministère de l’agriculture , le ministère de la défense, un retraité de l’enseignement supérieur, l’Institut environnement, santé et sécurité du Centre d’étude de l’énergie nucléaire belge SCK-CEN de Mol, le CEA, l’Association pour la surveillance et l’étude de la pollution atmosphérique en Alsace, le président de la commission M60-3 du Bureau de normalisation d’équipements nucléaires, l’IRSN.

    Par ces décisions, les laboratoires internes d’EDF ne sont donc pas ou plus agréés pour les mesures de tritium et de radioactivité bêta dans l’eau et dans l’air. L’ASN a demandé à EDF d’engager immédiatement un programme d’actions correctives qui doivent être opérationnelles au 1er février 2009.Jusqu’à obtention des agréments, EDF doit sous-traiter ces mesures de radioactivité dans l’environnement à des laboratoires extérieurs agréés.

    Ana Lutzky

    Le parc de production nucléaire d’EDF en France
    19 centrales – 58 réacteurs

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